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Quand mon lait est tiré, il faut le boire… ou le chauffer!

Martine Gingras

D’après plusieurs sources, notamment Mieux vivre avec notre enfant de la naissance à deux ans remis aux nouveaux parents à l’hôpital, la durée de conservation moyenne du lait maternel est être de 3 à 5 jours au frigo et de 3 à 4 mois au congélateur. Une fois ma production de lait bien établie, j’ai donc commencé à me traire — pardon, à tirer mon lait — et à congeler le précieux liquide, que nous n’avons commencé à donner que beaucoup plus tard.

Les deux ou trois premiers biberons sont passés comme une lettre à la poste, après une courte période d’adaptation et d’apprivoisement mutuel entre mon doux et la petite. Il faut dire que, pour m’assurer de la qualité et de la température du lait, nous lui avons donné des biberons fraîchement tirés. Pas de confusion sein/tétine, tout allait pour le mieux dans le meilleur des monde!

Mais un beau soir, quand mon doux a voulu lui donner un biberon décongelé, une véritable lutte s’est engagée. Peut-être n’était-il pas suffisamment tiède à son goût? Re-chauffe, re-tente de donner le biberon, re-lutte… «On dirait vraiment qu’elle ne le trouve pas bon», de conclure mon doux, désemparé devant les hurlements de notre adorée. Et moi de décider de le goûter…

«POUAH! Mais elle a bien raison de le refuser: c’est imbuvable!» Mon lait goûtait suri. J’étais pourtant certaine d’avoir respecté toutes les règles d’hygiène, autant lors de l’expression du lait que pour sa conservation, mais bon: il devait quand même y avoir eu contamination quelque part, nous sommes-nous dit.

Plus jamais nous n’avons donné le biberon avant de goûter le lait d’abord. Résultat: la majorité de ce que j’avais congelé a dû être jeté! Pourtant, aucune bouteille n’avait passé plus de 3 semaines au congélateur… On ne pouvait pas me repprocher d’avoir joué avec le feu.

Décidément, ce n’était pas demain la veille que j’allais pouvoir quitter le domicile, confiante que mon doux aurait un biberon de bon lait sous la main pour nourrir la petite en mon absence! J’ai donc recommencé à faire mes réserves à partir de zéro, en m’assurant de tout re-stériliser le matériel et de re-respecter les directives de conservation. Si j’avais pu me stériliser les mamelons avant de me traire, je l’aurais fait!

Et malgré toutes ces précautions, quand nous avons eu recours à ces réserves, le lait de la majorité des bouteilles goûtait toujours aussi mauvais. Pendant un mois, nous n’avons plus donné que des biberons de lait tiré le jour-même, ce qui m’a permis de sauter un boire à l’occasion, mais qui restait nettement insuffisant pour me permettre de sortir où que ce soit sans ma fille.

Cette semaine, une goutte a fait déborder le vase, ou plutôt le biberon: nous avons découvert que même du lait conservé à peine 36h au frigo avait développé ce goût atroce. Découragée, je suis passée à deux doigts d’introduire des biberons de préparation pour nourrisson, au risque que mon bébé la préfère ensuite à mon lait et se sèvre.

Mais avant, j’ai pris le temps de faire de longues recherches sur le Web — dont je vous passe le détail, mais où j’utilisais comme mots-clés des termes peu ragoûtants pour décrire le goût de mon lait — et j’ai ENFIN trouvé plusieurs autres témoignages qui m’étaient tristement familiers et, de fil en aiguille, une raison plausible au problème.

L’explication la plus probable est que mon lait présente une teneur élevée en lipase, une enzyme qui décompose le gras du lait. Trop de lipase dans le lait réduit considérablement sa durée de conservation, lui donnant rapidement un goût que certains qualifient de rance, suri, savonneux, métallique ou tout bonnement, comme le résume la principale intéressée, «ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiin»!

Fort heureusement, l’explication était doublée d’une solution: pour stopper l’action de la lipase, il faut chauffer le lait tout de suite après l’avoir tiré, sans laisser bouillir. On le fait chauffer dans une casserole sur le poêle, en le retirant du feu lorsque de petites bulles commencent à se former (sans quoi on perdra aussi les propriétés bénéfiques du lait maternel). Ensuite, on réfrigère et, dès que le lait est froid, on peut enfin le congeler.

Si simple, mais si peu documenté! Faute d’avoir lu quoi que ce soit là-dessus dans les nombreux livres de référence que j’ai feuilletés pour savoir ce qui clochait avec la conservation de mon lait, il m’aura fallu plusieurs mois d’essais et erreurs avant de conclure que le problème n’était pas dans la technique de conservation, mais dans la composition même de mon lait.

Alors un conseil d’amie aux nouvelles mamans qui allaitent et qui espèrent pouvoir compter sur un biberon à l’occasion pour leur permettre de prendre l’air: avant de tirer des réserves pour plusieurs mois d’avance, faites des tests en comparant le goût de votre lait frais avec du lait conservé 24h, puis 48h au frigo, ainsi que du lait dégelé. Il est normal que le goût soit légèrement différent, mais s’il vous semble carrément mauvais, bienvenue dans le club ce celles qui doivent faire chauffer pour être en mesure de le conserver!

Quelques références sur le sujet:
· http://www.kellymom.com/bf/pumping/lipase-expressedmilk.html
· http://www.drjaygordon.com/bf/worknursetips.htm
· http://www.breastfeed-essentials.com/storagehandling.html
· http://members.tripod.com/~bmsg/storageconcerns.htm
· http://parenting.ivillage.com/newborn/nbreastfeed/0,,3wt2,00.html

Commentaires

  1. Véronique

    Merci beaucoup Martine pour ces précieuses précisions! C’est vrai que c’est important à savoir, au cas! C’est Fanny qui va être contente ;o)

    Véro

  2. angelique

    Il m’est arrivé la même chose. J’ai allaité ma fille pendant neuf mois. A son 5ème mois, voyant la reprise du travail approché, j’ai commencé à tirer mon lait tous les matin sur un sein tandis que ma fille têtait l’autre. J’avais très bien respecté les règles d’hygiène, et j’était ravie de voir mon « stock » augmenter…si ce n’est qu’au moment de la donner à ma fille, il avait très mauvais gôut. Après en avoir gouté plusieurs échantillons, tous aussi mauvais, je me suis résignée à jeter , à contre-coeur, cet « or blanc » si durement collecté.
    Merci donc pour tes consignes que je suivrait pour le prochain bb.

  3. Angélique, je suis très heureuse que mon histoire soit utile à d’autres mamans dans la même situation! J’avoue m’être même demandé si certains cas de bébés qui refusent le biberon ne sont pas liés au même problème. Tant qu’on n’a pas goûté au lait, on peut penser que c’est la tétine que le bébé refuse…

    Je trouve vraiment surprenant que le problème soit si peu documenté dans les références sur l’allaitement. C’est sans doute plus rare qu’une mastite, mais quand même, à force de lire des forums sur le sujet, je vois que c’est un problème courant!

    C’est tellement frustrant pour la mère qui stocke inutilement puis qui ne comprend pas pourquoi son lait ne s’est pas conservé, traumatisant pour bébé (déjà que l’introduction au biberon est une étape délicate, imaginez si on lui refile deux ou trois «batches» de mauvais lait!), pour papa qui n’a aucun contrôle sur le processus et ne peut jamais donner le biberon (ou pire, qui soupçonne sa conjointe d’avoir des problèmes d’hygiène ;-)), pour maman encore qui ne peut se permettre aucune sortie seule, faute de stock de lait pour alimenter bébé en son absence…

    Je crois bien que je vais contacter les responsables de «Mieux vivre…» pour les inciter à dire un mot sur le sujet dans les pochaines éditions.

  4. La Puce

    Martine, il serait vraiment pertinent que tu fasses la remarque au Mieux vivre (si ce n’est déjà fait). Peut-être pourront-ils apporter cette précision.

  5. pimpim

    A diffuser à grande échelle Martine.
    Je pense même que tu devrais en faire un résumé sur le forum.

  6. Et pourquoi pas en informer les gens de la revue Enfant Québec?

  7. Sophie

    Il m’est arrivé moi aussi la même chose mais, heureusement, j’ai goûté avant et ouach, le goût m’est resté dans la bouche un méchant bout.
    C’est tellement de travail tirer ce précieux liquide, je ne peux pas croire que je devrai jeter toute ma réserve!!!
    En tout cas, merci Martine de nous partager tes découvertes, je vais retester dès ce soir.

    Sophie

  8. bibitte

    « #%%??*!!!

    J’ai dégelé un peu de lait et je fais partie des productrice de lipase semble-t-il…j’en dégèle un autre pour m’en assurer.
    Même la LLL n’en parle pas dans son bouquin et pourtant il s’agit d’un bon bouquin de référence…Faut-il croire que le lait humain n’a pas été conçu pour être congelé!!

  9. bibitte, ce n’est pas un problème lié à la congélation, mais à la composition du lait de certaines mères. D’après mes lectures et mon expérience (voir ci-haut), l’action de la lipase ne survient pas qu’à la congélation, mais aussi avec le lait passé au frigo ou laissé à température pièce dans les délais normalement considérés comme corrects pour la conservation du lait maternel.

    Si tu n’as des problèmes qu’avec le lait passé au congélo, il peut y avoir d’autres causes: choix du contenant de congélation, type de congélateur (celui du frigo conserve moins longtemps que les congélateurs coffres)…

  10. Mélusine

    Ah ben, j’ai eu le même problème et on m’a dit que c’était parce que je ne refroidissais pas complètement mon lait avant de fermer le contenant et de congeler. Ça n’a pas réglé le problème… on a alors mis en doute mon hygiène! Non mais!
    Merci mille fois, je le saurai pour le prochain bébé!

  11. Karine

    Avoir su!!
    voyant que ma cocotte refusait systématiquement tout biberon de mon lait qui avait passé quelque temps au frigo ou au congélateur, j’ai décidé de lui offrir du similac lorsque je devais sortir. Eh bien, j’ai par la suite vécu le cauchemar de toutes les mères qui veulent allaiter, mais que le bébé préfère les préparations… À 4 mois, je n’allaitais plus qu’une fois par jour. J’en ai pleuré!! Maintenant, à 7 mois, c’est fini. Avoir su!

  12. Laura

    Je savais que j’avais lu ça quelque part… J’ai finalement retrouvé où: Le Petit Nourri-Source. Je l’ai eu d’une collègue membre de la Ligue de la Leche pour 6$, c’est une vraie petite bible pour l’allaitement, je vous le conseille. C’est vraiment ce que j’ai trouvé de plus utile.

    J’abonde toutefois dans le sens que ça devrait être mentionné dans Mieux vivre…

  13. Martine, tu m’as sauvée… J’ai gôuté et compris pourquoi Virgile ne voulait rien prendre, bilan : toute la récolte d’août au frigo, j’en aurais pleuré ! Le lendemain, on a résolu le problème du biberon, après avoir essayé les Avent, les Nuk, les MamaDodie, Monsieur a choisi, enfin, les Nuby à picots (drôle d’idée).
    Désormais, mon lait est chauffé avant consommation. Va falloir que la Leche reconnaisse ce problème.
    On a donc résolu presqu’en même temps le pb du contenu et du contenant : merci encore, j’espère éviter comme ça la case lait en poudre chez la nounou !

  14. Geneviève

    Ton commentaire tombe tellement à point! Ma puce a 2 mois et demi et j’a jamais accepté un biberon. J’étais sur le point d’abandonner d’épuisement!

    Mon mari peux enfin prendre le relais à ma place…

    Merci.

  15. Gaëlle

    Hello !

    Moi aussi même problème!Et j’avais 5 bibes au congélateur ! ma banque de lait doit être refaite à fond….mais que faire du lait congelé ???Le jeter ??? Et bien j’ai été conseillée par l’association Allaitement des jumeaux et plus (http://www.allaitement-jumeaux.com/)
    et on m’a dit de ne surtout pas e jeter car le lait maternel est bien trop précieux, on peut donc l’utiliser plus tard, lors de la diversification dans des purées, ou bouillies, les enfants en raffolent il parraît !)

    Voilou !

    Gaëlle