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Plaisir solitaire

Martine Gingras

Vous savez, ces mauvais films et romans où, au petit matin, un des conjoints s’éveille et dit à sa douce-moitié que cette nuit de caresses et de folies était la meilleure de toute sa vie… et l’autre réalise avec stupeur que tout s’est déroulé à son insu car il dormait?

C’est exactement ce qui m’est arrivé hier. Non pas au lit, mais dans ma cuisine. Vraiment trop enrhumée pour amener mon doux souffler sa 32ième chandelle au resto, j’avais convenu avec lui qu’on se paierait un bon repas un autre soir… J’avais donc résolu de faire un petit souper santé et tranquille à la maison. Un tartare de thon mariné au pamplemousse et une petite salade, voilà tout ce que j’avais en tête.

Nous sommes passés au marché 440 (nous en deviendrons des habitués, c’est clair) acheter une belle pièce de thon. L’une dans la queue m’a parue particulièrement inspirante, car il apparaissait qu’elle se trancherait bien en petites rondelles, que je servirais à la manière d’un carpaccio. Des pétoncles ont aussi retenu mon attention. Il y aurait bien quelque chose à tirer de tout cela, me suis-je dit. Évidemment, nous avons aussi choisi quelques pâtisserie pour gâter le fêté.

Au retour, soudain inspirée, j’ai eu l’idée de mélanger au jus d’un pamplemousse fraîchement pressé une cuillerée de cari rouge, un peu d’oignon vert émincé, du gingembre frais râpé, une pincée de sucre et un peu de sauce soya. J’y ai fait mariner les minces rondelles de thon pendant une dizaine de minutes. J’ai aussi préparé une petite salade mélangeant avocat, poivron rouge, mayonnaise et un soupçon d’huile de sésame. Puis j’ai fait cuire les pétoncles à l’unilatéral (d’un côté seulement) dans une huile d’arachides chauffée à feu vif.

Pour servir, j’ai épongé les rondelles de thon, tout en préservant un peu de la marinade pour mélanger avec de la mayonnaise. J’ai présenté les rondelles se chevauchant en cercle dans l’assiette, en laissant un bout du cercle ouvert, que j’ai rapidement refermé d’une portion de salade d’avocat. Trois pétoncles ont décoré, en triangle, les rebords de l’assiette. La mayonnaise aditionnée de marinade a été déposée au centre… C’était superbe, mais je n’ai rien voulu prendre en photo, incertaine du goût de tout cela (car, je ne l’ai pas encore dit, mais à cause de mon vilain rhume, j’avais perdu l’odorat, ne goûtais pas grand chose et cuisinais à l’oeil).

Résultat? L’introduction vous le laisse deviner: c’était, semble-t-il, le meilleur repas que j’aie servi à mon doux depuis des années. J’étais à la fois trop heureuse que mon souper tout simple l’ait rendu encore plus heureux qu’un repas chèrement payé… mais en même temps, n’est-ce pas un bien triste plaisir que celui qu’on offre sans pouvoir le partager?

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